Autour du Grand Combin

By Bertrand, 21 avril 2022

Face au Grand Combin, paisiblement assis au soleil sur un muret bordant la cabane Panossière, nous dégustons une bière bien méritée. A nos côtés, un guide et sa cliente s’enquièrent de notre programme dans le massif. Bourg-Saint-Pierre, Combin de Boveire, Panossière, Petit Combin, Couloir ouest des pointes de Boveire, Bourg-Saint-Pierre. La répartie du guide est cinglante : « vous aimez marcher, vous… ». Sous-entendu, notre itinéraire n’est de loin ni le plus direct, ni le plus efficace.

Sur le coup je me suis senti un peu bête. C’est vrai que monter à Panossière par son versant nord via Fionnay aurait permis de maximiser les distances skis au pied. Mais à y bien repenser cette planification de course nous ressemble assez bien, à Jean-Baptiste et moi. Celle d’une vision quelque peu romantique de la montagne. A l’efficacité de l’itinéraire et la qualité de la neige, nous préférons systématiquement la beauté de l’itinéraire, l’appel du sommet et l’instinct de la tranquillité.

Certes nous devrons arpenter, chaussures de ski aux pieds, plusieurs kilomètres et plus de 600 mètres de dénivelée sur deux jours. Mais qu’est-ce à côté de la jouissance d’une montée en solitaire, de l’aube au zénith, depuis la vallée jusqu’à près de 4’000 mètres d’altitude. Parfums enivrants des mélèzes, crocus qui percent aux premiers signes de retraite de la neige, ruisseau nourri de la fonte des neiges hivernales et moraines désolées accompagnent nos premiers mille mètres. Les mille prochains seront sous le sceau des glaciers blanchis, des couloirs de neige gerbant le surplus hivernal, d’une raide face glacée prolongée d’une fine arête neigeuse puis enfin, le sommet. Seuls.

Partir en montagne avec Jean-Baptiste, c’est se reconnecter à l’essentiel. Le plaisir de la fraternité, le goût de l’effort, la gratitude de volatils instants de grâce.

De la gratitude il en faudra le lendemain pour trouver la force de sourire après 600 mètres de couloir à 40° de moyenne dans une neige infâme, jonchée de boulettes glacées et de tranchées creusées par les avalanches. Mais notre joie de vivre est inoxydable. Trop conscients de l’intensité et de l’unicité du moment vécu.

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