En cette fin d’octobre, le Verdon a revêtu sa parure automnale, patchwork de vert, cramoisi, ambre et doré. Le soleil joue les prolongations et offre un été indien propice aux amoureux de la nature et de l’escalade pour s’évader dans ces gorges spectaculaires. L’aridité de la végétation, accentuée par l’implacable verticalité des parois est à peine adoucie par les eaux cristallines du Verdon dont le filet s’écoule à plusieurs centaines de mètres en contrebas. Les vautours, véritables gardiens des lieux, effectuent leurs rondes et gardent un œil sur les hommes, visiteurs occasionnels de ce milieu magique et parfois hostile.
Je me rappelle fraîchement ce que j’avais ressenti la première fois que j’avais lancé un rappel au sommet de l’Escalès. Billet simple pour le vide et retour non garanti. Cette fois c’est Nick m’accompagne. Après notre épopée au Old Man of Hoy quelques mois plus tôt, je souhaitais à mon tour lui faire découvrir un monument de l’escalade de mon pays.
À notre arrivée dans les Gorges, nous nous rendons au Point Sublime, belvédère impressionnant qui nous permet un premier contact avec les parois, sans autre velléité que de les observer. Importance d’apprivoiser les lieux…. Nick à l’air beaucoup moins impressionné que moi lors de mon premier contact ; est-ce la démonstration du légendaire flegme anglais ?
Nous trouvons refuge au gîte de l’Arc en Ciel à La Palud sur Verdon. Le confort du dortoir est sommaire mais l’accueil, les conseils avisés de notre hôte (nancéien !) ainsi que la cuisine de notre hôtesse ont fait de notre séjour un moment exceptionnel. Un groupe d’une dizaine de sexagénaires anglais occupe le reste des places du gîte et contribueront aux longues discussions dont le thème unique est facile à imaginer ! Soit dit en passant l’âge n’a que peu de rapports avec les performances en escalade, la totalité d’entre eux encaissant avec une facilité déconcertante les grandes voies du coin ! Un bel exemple pour l’avenir…
En témoigne le deuxième jour où nous lançons les rappels dans La Dérobée, une voie de près de 200m de l’Escalès. Bêtement je manque la ligne de rappel et finis sur un relais trop à droite et 15m en contrebas de la ligne à emprunter. Manips de corde longues et inutiles alors que l’escalade n’a même pas commencé. Rageant…. Au final nous sortirons au sommet une heure plus tard que la cordée menée par Pierre, un local de l’étape. Bel exemple à nouveau…
Trois jours et trois grandes voies dans les gorges.
Chan-Thé, 280m à la falaise des Malines dans le secteur nord ouest des gorges, 6a+.
Il s’agit d ‘une voie typée terrain d’aventure ouverte par l’un des ouvreurs de la Demande, François Guillot en 1972. Cela aurait dû me mettre la puce à l’oreille ! En effet après une descente scabreuse à pied et un début somme toute classique, la voie offre de « beaux » (comprendre pas faciles et engagés) passages de fissures et de cheminées (parfois déversantes). Ceux-ci nous obligent à « renfougner » (comprendre utiliser de manière archaïque toutes les parties de son corps pour essayer de le coincer entre deux murs). Quant en plus de cela l’un des passages est rempli de ronces et qu’une erreur d’itinéraire m’emmène dans une cheminée bien trop à gauche où la seule protection est un arbre branlant, ceci donne une voie terrain d’aventure qui porte très bien son nom ! Une voie atypique qui aura le mérite de montrer à Nick le concept de « renfougne », qu’il n’apprécie pas beaucoup 😉
La Dérobée, 180m, l’Escalès, Belvédère de Trescaïre, 6b+ (6a obligatoire).
Première série de rappels dans les Gorges pour enchaîner les 5 longueurs de cette belle voie qui remonte une fissure franche et nous permet de goûter à l’escalade sportive du Verdon. Le plus beau morceau est sans conteste la deuxième longueur qui remonte un dièdre avec une escalade longue et continue. Pour l’anecdote, je me suis retrouvé dans le crux de la voie (noté « dièdre retors » sur le topo) avec 0 dégaines… la première partie est si bien équipée que je ne me suis pas rendu compte de l’épuisement inquiétant de mes ressources ! Désescalade pour récupérer le matos… J’ai fait le crux 3 fois ! A la sortie de la dernière longueur, une large vire nous permet d’opter pour la sortie de notre choix, un sapin de noël avant l’heure en quelque sorte. Nous choisissons une sortie en 6b avec un gros dévers au début puis un mur vertical de 20 mètres sur rocher gris, un avant goût de notre dernière journée.
Chlorochose puis Sucépé, 160m, l’Escalès, Jardin des Ecureuils, 6a+.
Probablement la plus belle voie que nous ayons parcourue durant ces trois jours. Un rocher sculpté sans patine, des passages raides continus, une belle ambiance dans les dernières longueurs et une escalade variée. Superbe. Afin d’éviter la première longueur de Sucépé réputée ténue (6b+) nous nous réchauffons avec les deux premières longueurs de Chlorochose, plus abordables. Le plaisir de parcourir ces longueurs est immense, les mouvements s’enchaînent bien, en harmonie avec le rocher sculpté. Plaisir de l’escalade.
J’ai le vertige rien qu’en regardant les photos !! Bravo !
et bravo aussi au photographe 😉
bon bah je suis définitivement complexée maintenant…
mais non on se la joue Big Wall mais c’est pas si terrible 🙂